Visualiser et écouter attentivement la vidéo youtube ci-dessous.
La personne qui intervient sur cette vidéo est Jean Pierre Helfer (JPH), éminent professeur de management à l'IAE de Paris et directeur général d'AUDENCIA Nantes. Sur cette vidéo, JPH nous fait part de sa vision de la formation des managers de demain. Il part d'abord d'un constat largement partagé que la crise de 2008 a entraîné de violentes critiques vis à vis
- des entreprises (en particulier les banques)
- les agences de notation
- les cabinets de consultants
- les business school
Ces acteurs sont accusés d'avoir fait preuve d'arrogance avec le temps, le risque, le collectif de travail, le contrôle et la notion de valeur. Cette arrogance a remis en cause tout un système qui doit être aujourd'hui transformé. Cette transformation passe notamment par la formation des futurs managers, c'est-à-dire les managers de demain. Pour cela, selon JPH il faut enseigner aux étudiants que les modèles n'ont jamais de valeur universelle et que tout peut être remis en cause du jour au lendemain. Il affirme également qu'il faut développer chez les étudiants un esprit d'initiative, un esprit de transformation, un esprit de leadership ainsi que des valeurs de transparence, d'éthique, d'engagement et de responsabilité.
Je partage complètement les affirmations de JPH. Toutefois, je voudrais tout de même ajouter un bémol. Car en effet, il y a la formation des managers de demain, ceux qui vont bientôt intégrer une business school et qui seront sur le marché dans quelques années, mais il y a aussi les managers d'aujourd'hui, c'est-à-dire ceux qui font actuellement bouillir la marmite! JPH ne dit rien à ce sujet et c'est bien dommage. Ces managers ont grandi avec les fondamentaux du monde d'hier et ils doivent s'adapter ou trouver de nouveaux repères pour répondre ici et maintenant aux enjeux qui se posent à eux en terme de management des hommes. La question qui se pose fondamentalement est comment aider les managers d'aujourd’hui à faire évoluer leurs pratiques et leur approche sur la question de la valeur, du risque, du collectif, du contrôle sachant qu'il est souvent aux prises avec des injonctions paradoxales et complexes ?
Personnellement, je pense que la formation des managers d'aujourd'hui est un levier majeur de réussite des managers de demain. Pourquoi? Parce que ce sont les managers d'aujourd'hui qui préparent tel un agriculteur le terrain de demain. Ce sont les agriculteurs qui fertilisent le sol, placent les boutures au bon endroit et savent dire en fonction du temps, des outils ou de l' expérience si la récolte sera bonne. Par analogie, il en est de même pour le manager d'aujourd'hui. C'est lui qui doit préparer avec la direction le terrain sur lequel vont évoluer les managers de demain. C'est encore lui qui saura dire, grâce aux bons outils qui lui auront été fournis par son DRH (ou qu'il pourra aussi confectionner), si la relève est assurée. C'est encore lui qui passera le témoin au manager de demain. Le manager d’aujourd’hui est un chaînon indispensable du développement du manager de demain. Vu sous cet angle, on peut penser que la guerre des générations X et Y n’aura pas lieu!
Les étudiants doivent développer un certain état d'esprit d' « initiative, de transformation, de leadership, de transparence, d'éthique, d'engagement, de responsabilité »
J'aimerais terminer ce billet sur la dernière partie de la vidéo. Celle où JPH indique que les étudiants doivent maintenant développer un certain état d'esprit. Mon opinion est que pour développer un certain état d'esprit, apprendre à être manager ne suffit pas : il faut en avoir envie! Or l'envie ne se décrète pas. Elle est conditionnée par d'autres paramètres tels que l'environnement, la spontanéité, les conditions d'exercice du métier, la motivation...
Je vais vous confier quelque chose. J'ai un jeune voisin qui a 15 ans et il est passionné de football. Sur recommandation de son club de football, ses parents l'ont inscrit dans un enseignement type sport-étude. Depuis qu'il fait sport-étude, il maitrise les techniques et tout le savoir-faire qu'on lui a enseigné et l'art du football (ce petit truc qui distingue le footballeur normal du grand footballeur). Tout le monde est certain que d'ici 3 ou 4 ans, il intègrera un grand club français ou européen. Ce jeune joueur s’appelle Jo R. Il est excellent quand il a envie de jouer croyez-moi. Mais parfois il lui arrive d'être médiocre quand l'envie n'y est pas. Quand tous les paramètres sont réunis, Jo est talentueux. Mais Jo devient banal quand quelque chose ne tourne pas rond dans son environnement. Et souvent, ce n'est pas grand-chose : un terrain en mauvais état, des chaussures trop usées, un ballon de mauvaise qualité, un arbitrage qui laisse à désirer, un temps à ne pas sortir promener son chien, une dispute dans les vestiaires avant le début d'un match, etc. Le manque d'envie s’installe surtout quand l'environnement n'est pas favorable quand bien même on aurait acquis un certain état d’esprit.
Je pense que c'est un peu la même chose pour le manager de demain. On aura beau développer tous les états d'esprit que l'on veut, faire appel aux meilleurs enseignants,etc, etc; mais si l'environnement du manager de demain ne présente pas des conditions favorables, l’envie ne sera pas au rendez-vous. D'où ma conclusion : il ne suffit pas de repenser la formation des managers, il faut aussi repenser les conditions d'exercice de sa fonction et plus globalement ses conditions de travail et celles de ses collaborateurs! Et cela n'est plus vraiment de la responsabilité d'une business school mais de cette de la Direction Générale.
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